Joe Ouakam, artiste
Hey Joe, c’est joli et ça
parle !
Le
chic choque ou enchante autant que la loque. L’essentiel est que ça nous parle.
Il y a de ces créatures si peu évidentes à percer, aussi malaisées à décrypter
que les « délirades » de San Antonio. Elles vous inspirent compassion
ou admiration –ou les deux à la fois- selon votre sensibilité. Ces individus
(ou individualités) ont ce côté obscur parce qu’engluées dans un personnage (ou
démon, et pas celui-là fictif) dont elles ne peuvent se départir. A un moment,
face à nos frustrations légitimes (c’est exaspérant de poser des questions sans
réponses), nous les nommons « fous du village ». Ils sont ceux que
nos vieilles mamans férues de « xawaare » et de goûts extravagants
épient pour murmurer « ndeysaan ». Car, il est venu à l’enterrement,
au mariage, au baptême, bref, dans nos affligeantes cérémonies (s’il y va),
avec ses frusques ; ce qu’il sentait que son corps et son esprit affranchi
voulaient enfiler. Ce n’est pas seulement « une révolte contre les usages
reçus et les costumes », pour parler comme Louis Maigron, encore moins
cette ardente envie d’exister des êtres esclaves de leur égo, Issa Samb, alias
Joe Ouakam, est juste différent, pour ne pas nous triturer inutilement les
méninges. C’est un grimoire. Autant laisser les sorciers s’en donner à cœur
joie.
Cet
artiste singulier effraie les mômes avec sa barbe, sa moustache, ses lunettes
aussi grosses que des jumelles et ses nippes plus impénétrables qu’un dédale ou
les premiers films de son ami d’outre-tombe, Mambety, autant qu’il enchante
ceux parmi nous qui « s’éprennent de frivolités » (en attendant la
maturation, nos peintres, sculpteurs… et leurs suiveurs devront s’y faire).
Quand
Sembène Ousmane montrait la volupté nègre à travers les seins de la négresse
dans nombre de ses productions cinématographiques, on s’en offusqua d’abord. Et
puis, on célébra son génie, comme on le fit pour le cran de Joseph Gaï Ramaka.
Joe Ouakam déroule un film dans lequel, le caprice vestimentaire est permis.
C’est sa pagaille, comme celle qu’on trouve dans sa cour. Devrions-nous
peut-être nous inspirer de lui ? S’habiller comme nous sommes au-delà de
nos asphyxiants préconçus. Que la mini-jupe ne soit plus le truc des libertines
par exemple. Il paraît que nos aïeux (les femmes) s’habillaient plus
« sexy », plus court que la dame du monument de la renaissance. Quand
on laisse la nature, le temps et le libre arbitre faire son œuvre, on se
chamaille moins sur des futilités. Le petit voile n’est-il pas passé d’étoffe
exclusivement islamique, sous nos cieux « syncrétiques », à effet de
mode, de style pour certaines jouvencelles et dames peu dévotes ?
(Excusez-nous d’aller dans tous les sens. C’est à l’image de celui dont on est
censé parler).
Exceptionnellement,
nous ne délivrons pas de note à cette « célébrité ». Elle est à part.
Ce sont deux êtres complices : Issa et Joe.
Farba Senghor,
PDS
Farba, pas mieux sapé que
Ngoutout, la grue !
Dans
le malheur, dans la déchéance et la solitude du perdant, on peut compter sur
ses vrais amis, sa famille ou sur cet individu
labélisé « mascotte » du coin (Bo diaddè premier kogn rek, am na
benn waay boufay took). C’est le gars zélé dont on ne se rend compte de
l’utilité que quand il ne sera plus là. Il veut continuellement se le prouver,
afficher sa toute servitude devant le maître et tous ceux qui le prendraient
pour le présomptueux « chambellan » sans grande ambition mais qui,
seul dans son dialogue intérieur, essaie de trouver le fil de sa vie, de
retrouver l’estime de soi. Notre homme cherchera à mieux paraître, à parodier
le maître, à se gargariser de sa proximité avec celui là qui ne s’est jamais
demandé ce qu’il représentait. A nos yeux, le chargé de la propagande du Pds
(c’est quoi ce machin vieillot !) est un homme d’honneur. Pour les
esthètes et autres « minettes étourdies », grandes dames pompeuses et
messieurs soigneux aux amours et goûts insolites, Farba (pas l’autre qui berce
Prési en criant), c’est juste cet être là qui foule aux pieds l’aura du chic
sénégalais (Pardonnez-nous notre chauvinisme, il est parfois exaspérant).
L’ancien
ministre sous Wade (ministre, cette tétine qui fait larmoyer les grands
« garçons ». Ne pleure pas Moubarak Low !), égaye ou agace par
le verbe. C’est selon. Sa mise, moins que sa tronche ramollie par des
lunettes-à-verres-correcteurs intello (Ne vous sentez pas offensés,
intellectuels pédants), fait également qu’il n’est pas ce « type »
qui enchante les cœurs s’abandonnant aux jouissances esthétiques. La
mégalomanie de Gorgui Laye, il la parodie en enfilant des costumes dans
lesquels un mastodonte ne se serait pas
senti à l’étroit. Les manches tentent désespéramment de s’accointer avec les
genoux alors que les revers entonnent un solo de détresse pour avoir été
laissés à eux-mêmes. Les chemises, pas plus stylées que celles à rabats des
magistrats, se dressent contre la torture sans avoir les moyens de leur
politique parce qu’« engoncées » dans une « bâche » (veste
si vous voulez) laissant entrevoir une corde traumatisante (vous pouvez aussi
appeler ça cravate).
On
dit du volailler de Ngoutout, dans nos chaumières, qu’il a la
« constance » du jardinier » (plus que celle que nous narre John
Le Carré dans son roman du même nom). Les Sénégalais - depuis que nous sommes
devenu leur porte-parole - ne s’en offusquent point tant qu’elle traduit
l’attachement viscéral à des principes politiques (ou à la figure tutélaire).
Mais, il y a parmi eux qui aimeraient vraiment que tu soignes un peu ta mise
quoi Farba (On peut te tutoyer, c’est plus fraternel) ! Il y va de ton
intérêt. Qui sait ? Peut-être que ça te permettra d’engranger quelques
voix pour Karim ou de déboulonner Aliou Ndoye au Plateau (puisque tu refuses de
te présenter à Nguéloul). Pour ne pas en rajouter à tes malheurs (il a été
délogé par son bailleur), nous te filons la note de 5/10. Mais tu devras suivre
les cours de vacance de Serigne, le socialiste.
Coumba Gawlo Seck, musicienne
Coumba,
la Grande royale
La
grande royale « tient tête » aux hommes à une époque où on leur
enlevait les bottes comme on le ferait avec un lutin à la maternelle (Mais il
parait qu’il y en a toujours parmi les mâles qui en tirent gloire). Dans la
description de Cheikh Hamidou Kane, il y a moins d’ambigüité sur la figure
imposante de la bonne dame. Elle n’est pas de ces créatures chauvines attachées
aux certitudes légitimatrices des privilèges d’une coterie qui voit, dans toute
évolution, la remise en question des valeurs « tribales ». La culture
occidentale était, pour cette dame de fer (on appelle ainsi certaines femmes
qui ne passent pas tout leur temps à être aux petits soins, à médire, à farder
la tronche…) quelque chose à percer pour s’ancrer dans la nôtre. Elle utilisait
le tam-tam pour appeler les hommes. Coumba Gawlo Seck les alerte par sa voix…et
le tam-tam. Et si Cheikh Hamidou Kane nous présentait en définitive la femme
« idéale » voyageant à travers le temps sous plusieurs traits ?
Parce que Coumba aussi s’habille royalement comme l’immense oratrice des
Diallobé. Coumba, ne nous a-t-elle pas si souvent sublimés par le verbe, plus
que beaucoup de nos pies écervelées ? Elle nous apparaît toujours plus
éclatante par son port altier, sa posture certaine et commode. Grand yi gno
amoul fit rek ! Le message est explicite mais face à des froussards, c’est
sans espoir…Bine bine, ma yeur liga yor, sa lii sa lè, Amadou, kouy feugg, elle
a tout fait. Elle s’est même une fois rasée pour appâter les poissons approchant
le rivage. Les poissons d’eau douce peuvent s’abstenir. Serait-ce Ablaye
Seytané, le satan, qui lave l’affront infligé par une impétueuse
« gamine » qui osa le tancer ouvertement ?
Allez !
C’était une petite digression pour booster mes « grands » ! En
tout cas, Ndiombor est en train de faire des démarches pour son
« poupon ». Coumba s’y est même rendue récemment, parée de ses plus
beaux atours. Mais ça, ce n’est pas nouveau. L’interprète de Pata pata est
incollable dans ce domaine. Elle a la délicatesse, le dandysme des Gawlo et la
coquetterie (pas celle là des nouvelles assidues des salons de beauté) sans
simagrées, toutefois, de nos cousins gaulois (la caricature est permise là-bas,
ici aussi, donc ça peut passer). On a l’impression que tout va avec sa « longiligne
carcasse » et cette peau qui n’est pas suppliciée par les produits
« toubabisant » sous nos tropiques. Son « éclat
impérieux », pour parler comme le « louangeur » de la Grande royale, traduit davantage sa
personnalité que les fringues qu’elle enfile merveilleusement bien. Et si les
poupées (bien qu’aguichantes !) s’en inspiraient pour ressembler moins à
des « femmes objets ». 9,75/10, sans possibilité de recours devant la
Cour suprême pour les êtres soupçonneux !
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