lundi 9 novembre 2015

Célébrités et sape 2

Joe Ouakam, artiste
Hey Joe, c’est joli et ça parle !
Le chic choque ou enchante autant que la loque. L’essentiel est que ça nous parle. Il y a de ces créatures si peu évidentes à percer, aussi malaisées à décrypter que les « délirades » de San Antonio. Elles vous inspirent compassion ou admiration –ou les deux à la fois- selon votre sensibilité. Ces individus (ou individualités) ont ce côté obscur parce qu’engluées dans un personnage (ou démon, et pas celui-là fictif) dont elles ne peuvent se départir. A un moment, face à nos frustrations légitimes (c’est exaspérant de poser des questions sans réponses), nous les nommons « fous du village ». Ils sont ceux que nos vieilles mamans férues de « xawaare » et de goûts extravagants épient pour murmurer « ndeysaan ». Car, il est venu à l’enterrement, au mariage, au baptême, bref, dans nos affligeantes cérémonies (s’il y va), avec ses frusques ; ce qu’il sentait que son corps et son esprit affranchi voulaient enfiler. Ce n’est pas seulement « une révolte contre les usages reçus et les costumes », pour parler comme Louis Maigron, encore moins cette ardente envie d’exister des êtres esclaves de leur égo, Issa Samb, alias Joe Ouakam, est juste différent, pour ne pas nous triturer inutilement les méninges. C’est un grimoire. Autant laisser les sorciers s’en donner à cœur joie.
Cet artiste singulier effraie les mômes avec sa barbe, sa moustache, ses lunettes aussi grosses que des jumelles et ses nippes plus impénétrables qu’un dédale ou les premiers films de son ami d’outre-tombe, Mambety, autant qu’il enchante ceux parmi nous qui « s’éprennent de frivolités » (en attendant la maturation, nos peintres, sculpteurs… et leurs suiveurs devront s’y faire).
Quand Sembène Ousmane montrait la volupté nègre à travers les seins de la négresse dans nombre de ses productions cinématographiques, on s’en offusqua d’abord. Et puis, on célébra son génie, comme on le fit pour le cran de Joseph Gaï Ramaka. Joe Ouakam déroule un film dans lequel, le caprice vestimentaire est permis. C’est sa pagaille, comme celle qu’on trouve dans sa cour. Devrions-nous peut-être nous inspirer de lui ? S’habiller comme nous sommes au-delà de nos asphyxiants préconçus. Que la mini-jupe ne soit plus le truc des libertines par exemple. Il paraît que nos aïeux (les femmes) s’habillaient plus « sexy », plus court que la dame du monument de la renaissance. Quand on laisse la nature, le temps et le libre arbitre faire son œuvre, on se chamaille moins sur des futilités. Le petit voile n’est-il pas passé d’étoffe exclusivement islamique, sous nos cieux « syncrétiques », à effet de mode, de style pour certaines jouvencelles et dames peu dévotes ? (Excusez-nous d’aller dans tous les sens. C’est à l’image de celui dont on est censé parler).

Exceptionnellement, nous ne délivrons pas de note à cette « célébrité ». Elle est à part. Ce sont deux êtres complices : Issa et Joe.

Farba Senghor, PDS
Farba, pas mieux sapé que Ngoutout, la grue !
Dans le malheur, dans la déchéance et la solitude du perdant, on peut compter sur ses vrais amis, sa famille ou sur cet individu labélisé « mascotte » du coin (Bo diaddè premier kogn rek, am na benn waay boufay took). C’est le gars zélé dont on ne se rend compte de l’utilité que quand il ne sera plus là. Il veut continuellement se le prouver, afficher sa toute servitude devant le maître et tous ceux qui le prendraient pour le présomptueux « chambellan » sans grande ambition mais qui, seul dans son dialogue intérieur, essaie de trouver le fil de sa vie, de retrouver l’estime de soi. Notre homme cherchera à mieux paraître, à parodier le maître, à se gargariser de sa proximité avec celui là qui ne s’est jamais demandé ce qu’il représentait. A nos yeux, le chargé de la propagande du Pds (c’est quoi ce machin vieillot !) est un homme d’honneur. Pour les esthètes et autres « minettes étourdies », grandes dames pompeuses et messieurs soigneux aux amours et goûts insolites, Farba (pas l’autre qui berce Prési en criant), c’est juste cet être là qui foule aux pieds l’aura du chic sénégalais (Pardonnez-nous notre chauvinisme, il est parfois exaspérant).
L’ancien ministre sous Wade (ministre, cette tétine qui fait larmoyer les grands « garçons ». Ne pleure pas Moubarak Low !), égaye ou agace par le verbe. C’est selon. Sa mise, moins que sa tronche ramollie par des lunettes-à-verres-correcteurs intello (Ne vous sentez pas offensés, intellectuels pédants), fait également qu’il n’est pas ce « type » qui enchante les cœurs s’abandonnant aux jouissances esthétiques. La mégalomanie de Gorgui Laye, il la parodie en enfilant des costumes dans lesquels un mastodonte  ne se serait pas senti à l’étroit. Les manches tentent désespéramment de s’accointer avec les genoux alors que les revers entonnent un solo de détresse pour avoir été laissés à eux-mêmes. Les chemises, pas plus stylées que celles à rabats des magistrats, se dressent contre la torture sans avoir les moyens de leur politique parce qu’« engoncées » dans une « bâche » (veste si vous voulez) laissant entrevoir une corde traumatisante (vous pouvez aussi appeler ça cravate).
On dit du volailler de Ngoutout, dans nos chaumières, qu’il a la « constance » du jardinier » (plus que celle que nous narre John Le Carré dans son roman du même nom). Les Sénégalais - depuis que nous sommes devenu leur porte-parole - ne s’en offusquent point tant qu’elle traduit l’attachement viscéral à des principes politiques (ou à la figure tutélaire). Mais, il y a parmi eux qui aimeraient vraiment que tu soignes un peu ta mise quoi Farba (On peut te tutoyer, c’est plus fraternel) ! Il y va de ton intérêt. Qui sait ? Peut-être que ça te permettra d’engranger quelques voix pour Karim ou de déboulonner Aliou Ndoye au Plateau (puisque tu refuses de te présenter à Nguéloul). Pour ne pas en rajouter à tes malheurs (il a été délogé par son bailleur), nous te filons la note de 5/10. Mais tu devras suivre les cours de vacance de Serigne, le socialiste.

Coumba Gawlo Seck, musicienne
Coumba, la Grande royale
La grande royale « tient tête » aux hommes à une époque où on leur enlevait les bottes comme on le ferait avec un lutin à la maternelle (Mais il parait qu’il y en a toujours parmi les mâles qui en tirent gloire). Dans la description de Cheikh Hamidou Kane, il y a moins d’ambigüité sur la figure imposante de la bonne dame. Elle n’est pas de ces créatures chauvines attachées aux certitudes légitimatrices des privilèges d’une coterie qui voit, dans toute évolution, la remise en question des valeurs « tribales ». La culture occidentale était, pour cette dame de fer (on appelle ainsi certaines femmes qui ne passent pas tout leur temps à être aux petits soins, à médire, à farder la tronche…) quelque chose à percer pour s’ancrer dans la nôtre. Elle utilisait le tam-tam pour appeler les hommes. Coumba Gawlo Seck les alerte par sa voix…et le tam-tam. Et si Cheikh Hamidou Kane nous présentait en définitive la femme « idéale » voyageant à travers le temps sous plusieurs traits ? Parce que Coumba aussi s’habille royalement comme l’immense oratrice des Diallobé. Coumba, ne nous a-t-elle pas si souvent sublimés par le verbe, plus que beaucoup de nos pies écervelées ? Elle nous apparaît toujours plus éclatante par son port altier, sa posture certaine et commode. Grand yi gno amoul fit rek ! Le message est explicite mais face à des froussards, c’est sans espoir…Bine bine, ma yeur liga yor, sa lii sa lè, Amadou, kouy feugg, elle a tout fait. Elle s’est même une fois rasée pour appâter les poissons approchant le rivage. Les poissons d’eau douce peuvent s’abstenir. Serait-ce Ablaye Seytané, le satan, qui lave l’affront infligé par une impétueuse « gamine » qui osa le tancer ouvertement ?
Allez ! C’était une petite digression pour booster mes « grands » ! En tout cas, Ndiombor est en train de faire des démarches pour son « poupon ». Coumba s’y est même rendue récemment, parée de ses plus beaux atours. Mais ça, ce n’est pas nouveau. L’interprète de Pata pata est incollable dans ce domaine. Elle a la délicatesse, le dandysme des Gawlo et la coquetterie (pas celle là des nouvelles assidues des salons de beauté) sans simagrées, toutefois, de nos cousins gaulois (la caricature est permise là-bas, ici aussi, donc ça peut passer). On a l’impression que tout va avec sa « longiligne carcasse » et cette peau qui n’est pas suppliciée par les produits « toubabisant » sous nos tropiques. Son « éclat impérieux », pour parler comme le « louangeur »  de la Grande royale, traduit davantage sa personnalité que les fringues qu’elle enfile merveilleusement bien. Et si les poupées (bien qu’aguichantes !) s’en inspiraient pour ressembler moins à des « femmes objets ». 9,75/10, sans possibilité de recours devant la Cour suprême pour les êtres soupçonneux !


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