jeudi 1 décembre 2016

Les condoléances seront reçues…!



« Ceux qui sont morts ne sont jamais partis…ils sont dans le bois qui gémit ». Gémissements de plaisir ou de chagrin ? Eclaire notre lanterne Birago Diop, nous, desséchées âmes indifférentes aux images des mots, à la poésie de l’horreur et de la béatitude. « Le souffle des ancêtres » s’éteint dans le brasier de l’insensibilité même si les larmes ruissellent aujourd’hui plus qu’hier. Nous les essuyons avec notre vanité mondaine, avec nos petites marottes.

Moi qui étais si prompt à chicaner sur les « gestes » de compassion des Sénégalais (jaxal), je me suis retrouvé, au décès de ma mère, les poches remplies de billets de banque comme jamais. Cela m’a été d’un certain secours. Je me suis servi de cette petite fortune pour nourrir et loger ceux-là mêmes qui m’en avaient gratifié ! Il m’a fallu ensuite acheter quelques matelas pour les « compatissants de luxe » comme on l’aurait fait avec la future belle-famille à l’occasion des épousailles (avant les chamailles). Ces hommes et femmes de la société « émergente » n’aiment pas trop le « thièbou yapp » et ne boivent pas l’eau en sachet (en même temps ils ont raison, cette eau-là !).

Le soir, quand les « chants lyriques » se sont noyés dans les souvenirs ressassés (toujours les bons, prescription divine, paraît-il) et que la bombance a pris fin, j’ai pris le temps de penser à ma « pauvre » mère. De sa nouvelle demeure, elle est certainement fière de voir son garçon servir ses vieilles amitiés avec déférence ; lui que leur affectée tendresse répugnait. C’est à peine si je n’ai pas exulté pour dire à ma mère « yaye sa fête bi neexna ! » (Maman ta fête a été belle !). L’envie de la lui raconter me brûla ». Elle m’a peut-être bien entendu :

« Ton bélier t’a rejointe au ciel. Pour le dîner, on a sacrifié la brebis. La viande du taureau n’a pas suffi. Tous tes amis étaient là. Et il fallait bien qu’ils mangeassent. J’ai demandé à ton grand frère de me prêter un peu d’argent pour les billets de retour des « villageois » comme tu aimais à le faire lors des fêtes de réjouissance. Mon oncle, bienfaiteur des chairs rondes de la capitale, a accédé à ma requête après que je lui ai donné en gage tes colliers en or en attendant le partage de l’héritage. Les quatre imams du quartier ont proposé leurs services. Le plus jeune s’est désisté après avoir soulevé une petite controverse. Tu as toujours respecté, maman, ces trois vieux, mais, moi, je les trouve tordus. Je n’ai pas encore eu le temps de te pleurer comme toutes ces personnes qui ne t’ont jamais rendu visite quand, malgré ta souffrance à l’hôpital, tu continuais à m’entourer de ta prévenance sous le regard amusé et ému de l’infirmière…Je te raconterai le reste quand j’aurai arrêté de frémir d’indignation…Ah, la vendeuse de cacahuètes, elle a tellement pleuré ! Elle m’a aidé à m’occuper de ta clique de grandes dames et leurs compagnons esbroufeurs ».


Birago, pardonne-moi cette offense. Les morts sont définitivement morts ; même ce pauvre taximan qui a subi la furie de ce jeune homme qui, dit-on, était promis à un « bel avenir ». Il conduisait de rutilantes bagnoles et passait à l’écran. Cette contingence dans cette ascension vers ce que nous concevons comme la réussite semble nous émouvoir davantage que l’acte ignoble qu’il a commis et qui anéantit les espoirs d’une mère éplorée et d’une ex-future épouse traumatisée à vie. Les esprits étroits et destructeurs d’un autre temps diront qu’elle porte la poisse pour en rajouter à sa peine. Aura-t-elle droit au « jaxal » psychologique ? Pas si sûr ! Et si les taximen en grève y faisaient un tour ? 

Ventilation « progéniturale »



Une de mes connaissances d’une touchante générosité, mari d’une femme peu précautionneuse, se tape de moins en moins la cloche. Cet ex-rupin, grand pourvoyeur de petites délices, bienfaiteur du chat et de la souris, des gueux (au propre et au figuré) et des hommes de cour de son apprêtée épouse, rase piteusement les murs. Les commères et leurs « potes de potins » s’en délectent joyeusement avec leurs petits « ndeysaan » de commisération. Ses enfants ont désormais pris un abonnement chez le gargotier ! 

Le matin au moment d’aller à l’école, le boutiquier du coin si peu discret, donne quelque menue monnaie (en attendant que le géniteur retrouve sa santé financière !) à l’un d’entre sa progéniture qui ne le regardait pas avec dédain. La petite chichiteuse du vieux désargenté devient subitement tendre, moins hautaine. Ses frères fréquentent désormais « les petites saletés » crasseuses jouant pieds nus avec des haillons, les Gtv (grosses têtes vides) du quartier. Le drame est qu’il ne peut pas compter sur sa pompeuse épouse, tournoyant toujours dans les airs de la vanité, comptant naïvement sur sa coterie fortunée et ses repus courtisans qui ne supportaient son aristocratisme incommodant que pour sa libéralité à leur égard.

Il faut bien que les mômes mangent, s’habillent, se soignent et gardent un peu de leur fierté. Au pays de Sall Ngary, sans argent, c’est un peu compliqué malgré les bourses familiales ! La stratégie la plus ingénieuse, pour d’ex-rupins, est de « ventiler les gosses ». Il doit bien y avoir quelque part dans ce vaste Sénégal un tonton, une tante ou un grand ami de leurs aïeuls qu’ils n’ont jamais cherché à connaître qui pourront se les coltiner durant les vacances…Tant mieux si la rentrée des classes coïncide avec la Tabaski. Les enfants vont revenir avec le nécessaire. Et si le tonton, la tante et ce « lointain » ami sont aussi généreux que le vieux du temps de sa splendeur, ils leur achèteront des fournitures… et du goûter. Et le tour est joué. Le budget des toilettes élégantes de maman ne sera pas grevé ! Papa, le débonnaire, n’oserait pas d’ailleurs ! Il en a fait une reine, amie des gens d’en haut qui ne descendrait de son piédestal pour l’innocence d’aucun petit capricieux de sa descendance.


Au risque de paraître égoïste, la « tactique d’éparpillement » des enfants employée par certains chefs de famille est déshonorante. Elle abat quelquefois la fierté de leur progéniture valsant éperdument, comme Maimouna (Abdoulaye Sadji), dans deux mondes de valeurs disparates. Les codes de convenance, dépouillés de toutes les fourberies, sont des moyens de raffermissement des liens sociaux. Mais, quand, au nom d’une solidarité plus idéalisée que vécue, on écrase l’autre du poids des devoirs non assumés, le glissement de sens est marqué. Les réminiscences constituent un viatique pour les âmes jeunes en quête de repères. Face aux vicissitudes de la vie, elles affirment, à travers ce passé lointain, leur personnalité morale. Le souvenir d’un père qui s’abandonne à la facilité et d’une mère insouciante est un accotoir fragile.

jeudi 26 mai 2016

Dialogue naz-ional


Les « Colombes » et autres autoproclamés médiateurs ou entremetteurs, c’est selon, ont été bien inspirés de considérer le président Macky Sall comme le « fils » d’Abdoulaye  Wade. Il n’a pas fait que lui succéder au pouvoir. Il le parodie. Et ce n’est là qu’un doux euphémisme pour faire honneur à son rang. Le troisième président de la République du Sénégal profitait des instants solennels de recueillement pour appeler la classe politique à se réunir autour de « l’essentiel ». Ce mot n’avait évidemment pas la même acception pour tout le monde. Toujours est-il que son appel fut rarement suivi d’effets. Il n’y avait que ceux-là que les « prairies bleues » attiraient déjà qui s’engouffraient dans la brèche. Cela ne servait en définitive qu’à donner une petite dose de dignité aux adeptes de la « mobilité politique » qui ne sauraient davantage attendre d’être conviés autour de la ripaille, cet acte « hautement républicain ».
Son successeur s’y est inscrit, avec moins de faconde certes, en réaffirmant son désir de nouer le dialogue avec l’opposition récemment quand il est allé présenter ses condoléances à une responsable politique. C’est louable venant d’un chef d’Etat taxé, à tort ou à raison, d’homme impassible et intransigeant. Mais, là n’est pas la question. L’impression qui se dégage quand on parle de dialogue au Sénégal,  c’est qu’il est circonscrit autour des leaders politiques. Il est davantage fait état de contentieux électoraux, de négociations sur  les retombées éventuelles et l’avenir politique des uns et des autres. L’enjeu est  moins défini en termes de propositions de gouvernance, de gestion des affaires publiques. Et s’il ne s’agissait que de cela, l’Assemblée nationale, comme dans tous les pays où les institutions jouent leurs rôles, est le lieu indiqué pour évoquer tous les sujets concernant les affaires de la cité. C'est vrai qu'on s'y farde la tronche (pour les ex-mères mbotaay) et qu'on s'y "crêpe" le veston (n'est-ce pas Oumar Sarr ) davantage que les méninges ne sont triturés, waayé nak...!
Si le président de la République est en désaccord avec le Parti démocratique sénégalais, c’est un secret de polichinelle, l’emprisonnement de Karim Wade et les tentatives de « désagrégation » (ce qu’il est en train de réussir) de son ancienne formation y sont pour beaucoup. Ici, le dialogue ne se pose plus en termes d’orientation économique ou sociale. Il a trait aux destins individuels. Et il ne lui est pas interdit de vouloir rassembler autour de lui les forces politiques du pays en tant que chef de parti pour sa réélection même si cela pose le problème de la confusion des rôles dans l’espace public. A-t-on affaire au leader de parti ou au président de la République. Les divergences d’opinions, d’options ne sont en rien préjudiciables au fonctionnement des institutions. Cela est plutôt un baromètre de la vitalité démocratique.

S’il doit y avoir dialogue, c’est certainement avec les syndicats de l’enseignement et de la santé vers qui il faut se tourner. Toute autre entreprise n’est que jeu politique sans intérêt pour les Sénégalais qui ont d’autres préoccupations plus urgentes que les chamailles et palabres des animateurs des 200 partis et des poussières. Le désamour entre la classe politique et les populations tient au fait que le débat public n’est pas en cohérence avec les aspirations des citoyens. Les appels au dialogue ne sont que de la poudre aux yeux. Les transhumants s’empresseront de se débarbouiller le visage pour répondre aux jouissances de sa majesté. Et ils n’auront finalement servi qu’à cela.


dimanche 20 mars 2016

SénéGALE, fepëy xasan (texte réchauffé)


Un bon ami, un tantinet fielleux, s’en prenait souvent aux Sénégalais qu’il trouvait tortueux. Plus que toute autre vilenie des animateurs des 250 partis politiques et des poussières, la question de la transhumance lui inspirait une certaine répugnance. Il me disait souvent, pour s’en offusquer, que les « transhumants » politiques ne débarquaient pas dans des prairies plus vertes avec un cheptel. Ils sont escortés et célébrés par des Sénégalais qu’ils y paissent.  La cohorte indignée poussant des cris d’orfraie est souvent celle-là qui s’apitoie sur sa propre infortune ; celle d’avoir été moins bien servie. Ce réquisitoire dressé par mon ami que d’aucuns qualifieraient d’aigri, donne matière à réflexion sur le vieux tube d’été de wade, « wax waxeet », remis au goût du jour par Macky.
Il y a quelque chose de cocasse dans cette histoire de reniement. La « vertueuse» société  s’émeut d’une infamie dont elle se couvre allègrement. Elle porte en triomphe « ñi man polotik », joli euphémisme voulant dire « baratineurs éhontés ». Je racontais, à mon tour, à cet ami les "bourlingages" politiques de mon grand-père. Celui-ci me ressassait sans se lasser la belle époque senghorienne « diamano toussé cornobof » (corned-beef). Il me parlait aussi d’Abdou Diouf avec émerveillement et conviction.
Je m’étais fait une religion : mon grand-père, connu pour son engagement politique que n’égalait que son illettrisme embarrassant, était un socialiste invétéré, sûr ; si socialisme il connaissait. Il avait la réputation d’être un « bon politicien » et embarquait souvent les ingénus vieux flemmards. Hélas, Wade est celui pour qui il s’est également battu pour sa réélection en 2012 avec une telle ardeur qu’on eut cru à un décret divin. Aux dernières nouvelles, de son lit d’hôpital, il a déposé son baluchon chez sa majesté Sall.

Il ne faut pas s’étonner donc que le président de la République ne donne pas plus de valeur à nos petites règles de bienséance si souvent chantonnées par les premiers transgresseurs, les Sénégalais. Les exhibitions des « zélés » de la couronne et les exaltations des louangeurs de la cour –ils sont dans leur rôle- ne suscitent pas l’émoi outre mesure quand le verbe ne traduit pas la vérité ; cette « agonisante  » vertu dont les Sénégalais si friands de moralisme s’entichent de moins en moins. Suprême paradoxe pour une civilisation d’oralité. Il fut un temps où la parole donnée tenait lieu de signature. Aujourd’hui, vous pouvez jurer sur tous les Saints et promettre la tête de votre mère et la dignité de vos aïeuls, vous ne ferez qu’en rajouter à la réticence de vos interlocuteurs.
Si le peuple n’a que les hommes politiques qu’il mérite, portons alors le toast à l’honneur de l’alliance pour la fourberie et le reniement. Comment nous avons appelé ça ? Wax waxeet ! Nous faisons semblant de nous en offusquer. Mais nous le chantons, nous en rions. ! Nous aimons ce côté pernicieux de ceux qui le répandent.
On pouvait espérer l’éclaircie de certains « enturbannés » au verbe mystificateur dont l’immixtion dans le jeu politique ne montre que l’étendue du mal. Que dire de la société « si vile », ce luxueux château de recyclage pour politiciens en mal de succès ? Les accointances avec les politiciens qu’ils vouaient aux gémonies, de l’opposition comme du pouvoir, ne traduisent que la versatilité, pour beaucoup du moins,  de leurs causes. Mais, ils ne sont qu’à l’image de ceux qu’ils prétendent défendre, les Sénégalais si peu fiables. Deuk bi fepëy xasan !


mercredi 2 mars 2016

Manda-bi

Les génies parmi nous, hommes de petites intelligences, ont, sans vouloir rendre des oracles, cette créativité prémonitoire qui rebute de prime abord les esprits étroits avant d’interpeller ceux-là plus alertes. Qu’ils soient butés ou vifs, ils ont en commun le temps incertain comme à la fois allié et contradicteur. Et Le revers et le triomphe comme baromètres de leur  risible et ignoble mauvaise foi.
Dans son film, « Manda-bi », Sembene Ousmane nous rappelle nos propres inconséquences. Ceux à qui le « manda » n’était nullement destiné espéraient davantage en jouir que le bénéficiaire. Pour ce dernier, le temps filait vite. Il usa tant de subterfuges pour le percevoir qu’il n’en profita pas assez (ou peut-être jamais). Les créanciers commençaient à s’impatienter. Ils n’éprouvèrent aucune appréhension : « dès qu’il disposera du mandat, il honorera ses engagements. Il n’est pas aussi roublard que son vieux maître », se disaient-ils pour ne pas se faire du mouron. Nous ne parlons plus du défunt cinéaste. Nous faisons référence au peuple sénégalais à qui l’on doit une dette.
Euphoriques, nous ne fîmes guère attention aux  nouveaux pestiférés « oisillons » de mauvais augure (avec qui sa majesté picorait avant 2008) qui pépiaient. Paf ! Tout à coup, le chantre de la vertu se souvient de la bonne dame « constitution » qui  refuse toutes les avances depuis juin 2011. Subtile dérobade ? Contrairement à l’infortuné personnage du film de Sembene, l’ex-poulain de Wade a trouvé le moyen de s’enfuir avec son butin qu’il avait promis de partager avec la jouvencelle « démocratie », loin des aspirants ! Échappée solitaire sous les huées des râleurs publics et de la coterie des spécialistes de la science dévoyée, le droit ! Avis, décision, rétroactivité. Et quoi encore !
Il se retourna et vit qu’il n’avait pas affaire à une bande de manchots et d’éclopés. « Ils courent vite dé. Gars yi ñu concertation waay ! » Sa majesté a enfin compris qu’il ne fallait pas toujours écouter les fidèles mammouths (Niasse, Tanor, Dansokho et leurs cliques) qui barrissent de désillusions…électorales. Les situations les plus incertaines ont été le fait de ces éternels et vieux « losers » et de ceux qui portent mal le qualificatif « sage ».
Le juge constitutionnel sénégalais, si souvent incompétent, ne sort de sa somnolence que pour renouveler son pacte d’allégeance au « prêteur » de privilèges, le président de la République. Il faut lui en savoir bon gré pour tirer parti de sa générosité. Pour les Sénégalais, le contrat de confiance est rompu depuis belle lurette. Qu’il y ait cinq ou sept « sages », on ne fera qu’en rajouter à leur répugnance. Comme celle que devrait leur inspirer la classe politique, adepte de pirouettes surréalistes. Ce référendum ne se résume pas en un « oui » ou un « non » pour les citoyens embarrassés par tant de reniements. Un faible taux de participation traduira forcément le mépris du peuple à leur égard.   
On peut légitimement douter de la sincérité du président de la République, Macky Sall,  singulièrement sur la question de la réduction de son mandat. Il est également permis de s’interroger sur le débat entretenu par l’opposition surtout en ce qui a trait à la laïcité. La complexité de cette question commande un discours plus responsable pour ne pas mettre en péril ce que les pères fondateurs ont minutieusement construit. Le crédule personnage de Sembene aurait volontiers cédé son « manda » pour préserver ce legs. Et vous, le feriez-vous ? Oui ou non ?






  

jeudi 11 février 2016

Nos chers goorjigeen


Quand je n’étais encore qu’un môme aimant s’acoquiner avec les malfamés individus, il m’arrivait de voir des choses peu ordinaires. Il y avait parmi eux, un jeune « gars » qui se rengorgeait de ses étrangetés (ou déviances pour faire genre) pour nous impressionner : manger un chat  par exemple (là où nous étions, on ne s’en nourrissait pas). Plus on semblait s’émouvoir de sa singularité, davantage il nous en mettait plein la vue. Un jour, on me raconta que le cocasse personnage « fricota » avec une bourrique (pour satisfaire sa libido ?) devant un parterre de curieux. Cela fit le tour de quelques chaumières. Certains n’y crurent point. Il parait qu’il a reçu quelques baffes des contristées mains de sa génitrice.
Pour convaincre les sceptiques, il reprit son infamante scène de petites mœurs. Est-il un zoophile ? Un simple maniaque instinctif ? Un petit inconscient en mal d’attention ? Je ne l’ai plus revu depuis cet épisode. J’étais parti sous d’autres cieux.  Mais, me dit-on, c’est un homme respectable aujourd’hui avec,  comme on se plait à concevoir l’épanouissement, une épouse et des enfants. C’est un rescapé pour parler de manière triviale. Ne le sommes-nous pas tous d’ailleurs ? Les irrépressibles envies ne sont pas forcément celles-là communes qu’on découvre par soi-même. Elles sont parfois suscitées par l’autre…à la même conformation des organes génitaux. Certains s’y attacheront. D’autres s’en détourneront. Cet autre n’est pas toujours cet être venu d’ailleurs aux antipodes de nos valeurs…sexuelles ! C’est un oncle, le copain de papa, l’amie de maman, la tante…Le « mal » est ici. Il est en nous. Des marches de désapprobation ne feront que l’enfouir au tréfonds des désirs opprimés. On ne criminalise pas des inclinations naturelles. On les encadre pour préserver les âmes insouciantes dans nos internats, dans nos couvents, dans nos écoles coraniques etc.
Les mâles chiqués aux phrasés et tics exquis (parce que répétés dans nos chaumières) qui s’entichent du membre viril devraient inciter à nous interroger sur ce qu’on est (ou croit) en train de devenir. Sur ce que, peut-être, nous ne sommes plus : nous-mêmes.
Quand les institutions pourvoyeuses de sens sont en parfaite contradiction avec l’imaginaire des « masses », il ne faut pas s’étonner que la société soit désarticulée. Les désirs « matés » de ceux qui estiment que « rien de ce qui procure la joie n’est contre la nature » (Henri Troyat), profitent des brèches laissées entrouvertes par notre propre déliquescence entretenue par nos fourberies qu’on prend pour des valeurs. La soutoura. Mon œil ! Ici, ce que le mari chuchote à son épouse est cancané à la foire aux médisances. Les invertis, les gigolos, les zoophiles, on les connait plus que ne semble le démontrer notre ébahissement face à leur « subite » exubérance.


mercredi 20 janvier 2016

Neegu Yalla, bitik Imam aki gangooram


D’ex-rupins à la retraite, en mal d’« audience » (les drianké sont allées chercher ailleurs) et d’exutoire, prennent plaisir à transformer  tous les petits coins de nos  exigus quartiers en  « échoppe ». Ou si vous voulez, mosquée, neegu Yalla.  On garnit son dressing-room de froufrous, de grands boubous empesés. Le falzar et la chemise sont mis au frigo. On s’achète un chapelet plus gros qu’un boa. On marmonne en saluant les bonnes dames. On dégotte un imam à la rhétorique savoureuse. C’est une aubaine pour lui. Il n’a jamais rien fait dans sa vie. C’est lui qui séparait les ménagères qui se crêpaient le chignon quand ses nouveaux « copains » (qui se souvenaient de lui à chaque fois qu’ils devaient donner l’aumône aux indigentes gens) étaient au boulot. La bande des ex-coquets (coquins ?) à la retraite le sort de son ennuyeuse existence et le met au centre des crédules dévots. Il leur faut bien un imam « compagnon » fidèle de la galère, prêt à les accompagner dans leur subite repentance et qui ne leur ressasserait pas inlassablement les paroles divines. Ce n’est d’ailleurs pas sûr que l’Imam en sache bien davantage qu’eux. Il a juste dû apprendre à mieux débiter la Sourate Fatiha et quelques petits versets (Julli day gaaw, waruño teye mboolo mi) qu’une bouche dépeuplée de ses dents ne réciterait guère moins bien que lui.
Un  peu de tintamarre ne ferait pas de mal à un nouveau « commerce » tenu par une vieille garde décidée à le rentabiliser. Des « laay laay lal-la » criés (le participe « psalmodiés » aurait été insultant pour les êtres férus de bonnes notes) à tue-tête y participent. L’oreille du Seigneur est devenue dure ! Il faut hurler ! Les micros amplifieront « l’horreur ». La transition n’est jamais évidente. Une embardée effraie toujours. Soyons indulgents avec les nouveaux « fous de Dieu ». Passer de Peter Tosh ou Ray Charles à Abdallah Soudais…ça craint ! Ou de « chauffeur » de bal musette à muezzin insomniaque ! Ça sonnaille beaucoup, mal et fort. Et à envie. Désormais, le peuple se réveillera tôt. Les oreilles siffleront. Les « pestiférés » peu exaltés pesteront. La gérontocratie s’en moque éperdument. Elle doit bien vendre sa cabane, l’entretenir. Il y aura toujours un « machin à acheter » : une moquette, un plafonnier, un micro, « def ci jakk ji, man kaana lillahi kanal lahu lahu ». Les patriarches stimuleront l’élan de commisération des âmes bienfaitrices à l’égard de…leurs pauvres, « dimbali neew ji doole yi ».
Les vieux copains, « accotés » au discours mystificateur de leur recrue d’imam, s’entichent jalousement de cabas et de besaces. Leur « forteresse » devient le réceptacle de nos compassions, de nos désirs viscéraux de croire au mirage, à leur soudaine « métamorphose spirituelle », Yalla mooy defar jaam bi, mookoy sedd ». Les menues monnaies récoltées ça et là ne sont qu’une gratification du Seigneur satisfait de la bonne tenue de sa « chambre », jamais aussi bien animée.

A pour - suivre…