mercredi 29 octobre 2014

Nos limites, nos “Espècialistes” et quelques incohérences


Mon souhait, après le mondial brésilien, était que la Deutscher Fuβball-Bund mît fin à son compagnonnage avec son sélectionneur Joachim Low malgré le titre. Mon intime conviction est que ce coach avait affiché des limites criardes –quelle prétention me direz-vous ! – mais que ses joueurs sont arrivés à un tel niveau de performance et surtout de maturité qu’ils se « dépouponnèrent » pour marquer de leurs empreintes l’histoire du football allemand privé de titre majeur depuis 1996 avec l’euro anglais. Le Sénégal, lui, n’a pas un mauvais sélectionneur. Giresse fait même partie du gratin technique du football africain malgré quelques incohérences. Celles que nous ressassent à longueur de journée nos « Espècialistes maison » aveuglés par le « dogme de la prééminence » pour parler comme l’ancien président du conseil Mamadou Dia, sont encore plus affligeantes. Mais disons le clairement, le Sénégal n’a pas un problème de joueurs, il lui manque plutôt des footballeurs de talent et des leaders charismatiques.
En deux matches, le Sénégal n’a obtenu, avec beaucoup de regrets, parce qu’il y avait de la place, qu’un point face aux aigles de Carthage. A la place d’un jeu fluide que pouvaient espérer les férus de « foot-champagne », l’on a eu droit à une partie stéréotypée digne d’une rencontre de CFA avec des pertes de balles impardonnables à ce niveau, des choix incompréhensibles dans le dernier tiers…On s’en remettait au génie de Msakni (au retour) et Mané pour animer une rencontre soporifique. Le cœur y était mais le talent faisait défaut. Cette équipe du Sénégal manque cruellement de génie, de spontanéité mais surtout d’équilibre entre ce qu’elle est capable de montrer comme engagement –surtout défensif- et les limites affichées dans l’animation offensive qui exige plus de justesse dans les transmissions. Malheureusement, ce n’est pas nouveau sous nos cieux. Et aucun sélectionneur n’a trouvé la bonne formule jusqu’ici. Amara s’y était employé en utilisant des attaquants axiaux pour animer les couloirs (Moussa Sow). Giresse s’obstine à aligner Badji sur le coté droit comme Metsu l’avait essayé avec Sylvain N’diaye en match amical à Dakar contre l’Algérie et face à la Zambie en 2002 avant de se rendre compte du déséquilibre que cela provoquait. Dans le repli défensif, c’est certain que le pensionnaire de Brann Bergen est plus utile qu’un Saivet (bléssé) ou Issiar Dia qu’on a malheureusement très vite enterré. Mais que peut-il apporter de plus que ces joueurs dans la production offensive ? Badji est intéressant dans l’engagement mais pour plus de variété dans le jeu, Giresse gagnerait à équilibrer ses listes et la composition de ses équipes. Contre la Tunisie sur les deux matches, il n’y avait qu’un seul véritable joueur de couloir (Cheikh Mbengue). Zargo n’en est pas un. Sadio Mané, on peut encore en discuter.

A Dakar, contre la Tunisie, il n’y avait aucun milieu offensif sur le banc. L’entraineur n’avait aucune possibilité de modifier l’animation offensive de son équipe à part faire entrer des attaquants de fixation ou des milieux à vocation défensive. Il ne faut pas espérer de Stephan Badji l’éclair de génie dont nous a gratifiés Issiar Dia face au Cameroun à Dakar alors qu’il venait d’entrer. Une équipe c’est une combinaison de profiles différents. Un milieu excentré droit, quelque soit ses limites, aurait permis de diversifier le jeu d’attaque et le rendre moins prévisible devant une équipe regroupée comme celle de la Tunisie. Il ne faut pas attendre de trouver un autre petit Sadio Mané pour aligner un milieu offensif de métier sur le côté droit ou chercher une alternative crédible à l’intermittent du spectacle Dame Ndoye. Metsu avait réussi, en 2002, avec des milieux offensifs moyens (Moussa ou Matar Ndiaye) à trouver l’équilibre entre les phases offensives et défensives indispensable surtout avec des attaquants de fixation (Sow, Ba, Cissé) qui dépendent beaucoup de la production de l’équipe d’où la nécessité de disposer d’attaquants aux profiles différents (Diafra Sakho utilisé parfois sur le coté en club, Baye Omar Niasse qui occupait le couloir droit en équipe nationale locale et olympique et dans une moindre mesure Babacar Khouma de la Fiorentina). L’équipe gagnerait en mobilité et offrirait un jeu moins stéréotypé.

Giresse fait jusqu’ici un bon travail. Il a redonné à cette équipe du Sénégal, qui n’existait que par l’aura des joueurs qui la composent, une âme. Il faut aujourd’hui s’investir dans la formation pour faire éclore des footballeurs plus techniques. L’Allemagne y est parvenue avec beaucoup de succès en acceptant de « perdre » de sa roublardise, et un peu de sa rigueur défensive. Le profile du footballeur sénégalais est très axial. C’est ce qui devrait être le plus grand chantier de nos « Espècialistes » qui s’épanchent à longueur de colonnes pour vendre une « expertise » aussi « étendue » que le parcours des clubs sénégalais en compétitions africaines et pointue que celle de ma vieille grand-mère qui n’a jamais regardé un match de foot de sa vie.

Les analyses de nos « Espècialistes maison » sur le système de jeu de Giresse –sur lequel on ne devrait pas trop s’appesantir d’ailleurs, car il ne constitue qu’une photographie de départ et est surtout très flexible- ont donnée lieu à un paralogisme inquiétant qui montre à suffisance que ces personnes chargées de former nos footballeurs ne se hissent pas au niveau d’exigence que requiert leur métier. Quand on s’érige en expert dans un domaine, il faut se donner la peine de s’outiller en ne se calfeutrant pas seulement dans une futile virtualité. Ce système, objet de toutes les niaiseries, est bien connu au Sénégal. Dans une période récente, à la CAN 2000, Peter Schnittger l’avait utilisé en associant Pape Malick Diop, Cheikh Sidy Ba et feu Assane Ndiaye dans l’axe central de la défense. Ottmar Hitzfeld est celui qui a eu plus de bonheur avec ce système en remportant la ligue européenne des champions avec le Borussia Dortmund (1997) et le Bayern Munich (2001) en l’espace de quatre ans. En Afrique, l’Egypte en est la référence ces dernières années. Le Cameroun l’avait également expérimenté avec Winfried Schäfer…Alors pourquoi autant de discordances, d’interrogations sur l’adaptation de nos joueurs pour un système bien connu et de plus en plus usité dans le monde (Pays Bas sous Van Gaal et Pep Guardiola parcimonieusement avec le Bayern cette saison) ?

Il est important que nos techniciens locaux mesurent la responsabilité qui est la leur parce que leurs avis comptent. Giresse ne vit pas dans une bulle. Des observations pertinentes comme celles émises récemment par une avérée compétence, Amara Traoré, fondées sur la science, sur des statistiques et non sur ce que veulent entendre quelques « copies-pissées » pour remplir des colonnes en mal de lecteurs, donnent au technicien une meilleure visibilité sur son travail. 

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