vendredi 23 octobre 2015

Le look, la loque et le froc


Je fis compliment à « mon grand souvent défoncé » de cette savoureuse anecdote. Il en racontait de bonnes quand Jah ne faisait pas immersion dans ses incessantes divagations. Il est de ces êtres dépréciés par l’herbe hallucinogène mais d’âmes pures. Un prétendant vint voir sa sœur absente de la maison. Il n’était pas bien habillé. On l’installa (j’ai envie de dire parqua) dans la remise. Mère Theresa des rupins et autres fils de bonne famille qui n’avaient pas besoin de sa charité, ni de sa sournoise prévenance, demanda qu’on lui filât le « bol dof » pour s’en débarrasser.  Elle ne se doutait pas que ce « fagoté » pouvait être le bien-aimé de sa « chose », sa fille. L’homme se gava amèrement pour narguer et prit congé de la famille sous le regard condescendant de celle-ci. L’histoire entre ce crésus mal vêtu et la demoiselle aux fantaisies agaçantes prit fin ce jour là. Mère Theresa, c’est une évidence, s’en voulut à mort. Elle avait trop longtemps rêvé d’un gendre plein aux as. Le Ciel l’en gratifia, jusque dans sa chaumière, dans une enveloppe (vêtement)  qui la répugna autant que le suaire d’une victime d’égout.
La nymphe (ou ce qu’elle croyait être) ne se remit pas d’être passée à côté d’un homme riche qui ne s’encombrait pas de fioritures. En sus, elle semblait s’éprendre de lui petit à petit. Peut-être, prit-elle juste goût à sa frugalité…et à ses liasses. Quoi qu’il en fût, elle n’aimait pas le présenter aux individus à la mise soignée et à la propreté et civilité douteuses, si souvent surexcités face aux petites choses dont on ne se rend compte de l’intérêt aux yeux des autres que quand elles prennent une ampleur presque insolite.
Pour un morceau d’étoffe, on s’attache à l’autre, aux bourreaux, parfois aux bonimenteurs qu’on accueille avec égards.  Il définit parfois nos rapports avec ceux qui aspirent ou prétendent nous mener à bon port, l’homme politique. On s’est laissé divertir, en 2000, par la tronche d’un apollon au teint crémeux. Aujourd’hui, j’entends par-ci, par-là, quelques minettes survoltées et d’amusantes  dames saliver sur « xale baca prison ba ». Son « minois » et sa carnation (notre rapport avec l’épiderme est complexe), semble-t-il, sont avenants. Chez nos cousins gaulois, on « discutaille » sur l’embonpoint de sa bedonnante majesté. Au pays de l’oncle Sam, on s’extasie sur la sveltesse du fils du Kenyan. Notre inclination pour les insignifiances nous joue des tours. Le dandy, ce tire-au-flanc, ami de nos bonnes dames, louangeur des benêts et dédaigneux à souhait à l’endroit des miséreux, est préféré au « bûcheur ». Après on vient s’offusquer de son indolence.
J’en étais où avec « mon grand souvent défoncé », le taré de la famille ? Il s’en donna à cœur joie. Il espérait, du fond du cœur, un jour, pouvoir se gausser  de l’infortune de sa génitrice et de sa cadette. C’est lui qu’on suppliait de s’éclipser à chaque fois que les gros bonnets (au propre) pointaient le bout de leurs…froufrous pompeux. On lui promettait son poison. Il ne fallait pas qu’il empestât les bergères dans lesquelles se vautreront les « grands boubous » empesés. Car, Mère Theresa croyait toujours à la bonne étoile de sa petite crédule qu’elle abêtit et rendit oisive et frivole. A plusieurs reprises, l’ex innocente fille se noya, avec la vorace proxénète de sa progéniture, dans les méandres des fringues d’apparat de ses aspirants.
Elles s’attachèrent au paraître ; l’être les désenchanta comme les promesses d’un monarque sadique (pas très loin de chez nous) des temps modernes face au supplice de la guillotine. Le peuple découvre un jour qu’il avait une tête, un tronc et quatre membres (mes cours à l’élémentaire) et que cela faisait mal quand on les lui coupait. Il dissimulait juste ses imperfections, tares et angoisses dans un grand boubou blanc et justifiait l’ignominie par ce que quelqu’un, sous nos cieux, a assimilé à la culture grecque. Ce que l’on croit relever de l’accessoire porte un message plus explicite que les fourberies du langage. Mon « grand souvent défoncé », dans ses exquises errances, me le ressasse continuellement.

A suivre…

lundi 5 octobre 2015

Pour que la lutte soit…du sport

Si miracle se produit

Au détour d’une discussion,  un vieux belge fit cette remarque « Vous avez une singulière façon de nommer les choses». Sacrilège ! Il fouette la fierté de tout un peuple en ironisant ainsi sur ce qui est considéré comme le sport NATIONAL, la lutte avec frappe. 

Au Niger, on lutte sans cogner. Aux Etats Unis, on rosse de coups son adversaire. Ce pugilat, ils l’ont appelé boxe.  Le si futé sénégalais a trouvé la parade. Il allie coups de poing et corps à corps. Facile combinaison pour se faire un sport NATIONAL. A y regarder de plus près et en oubliant un peu notre chauvinisme obstruant, la boutade du Belge interpelle. A quoi bon se rendre aux Etats-Unis, en Turquie, en Italie… si c’est pour montrer ses talents de danseur. Autant se rendre chez Germaine. Ici, on lutte si peu.

En boxe, le show est subsidiaire le jour du combat.Les « empoignades », si ce n’est faire trop d’honneur aux « mastodontes chorégraphes », tiennent de l’anecdote. On glisse, on reçoit une petite calotte, parce qu’on frappe si mal. Et c’en est fini du spectacle qui faisait saliver Sandaga, Tilène, Colobane…et maintenant les amphithéâtres ! Les enragés dont l’idole, bâtie à chaux et à sable, est vaincue, peuvent s’en prendre aux passants, aux riverains pour se soulager de leur niaises désillusions. C’est selon. Le gaillard leur a servi de jolis pas de danse, mieux peut-être que son bourreau du soir. C’est suffisant non ? Il a plus sué dans sa chorégraphie que dans l’arène. Ah sur le podium ! Passez-moi cette erreur de langage.
Devrions-nous, peut-être, songer à appeler cela « culture nationale ». Senghor, d’outre-tombe, s’en émouvrait. Il parait qu’il n’aimait pas la lutte. Sa raison hellène le turlupinait. Etrange quand même pour un fils de Joal. Là-bas, le « mbapatt », (encore que c’est plus sensé que ce qu’on a appelé lutte avec frappe)  a permis de ramener, de temps à autre, à la maison, un sac de riz, de composer un cheptel, d’élever une chaumière. Nous nous en offusquons moins que l’extravagance, le grotesque paralysant dans lequel le Sénégalais se noie. Il ne faut pas pousser la vilénie jusqu’à penser qu’il ne peut aimer autre chose. Le président Lamine Guéye disait, dans un langage moins cru et plutôt caricatural, ceci : « Le besoin pour un clochard, c’est évidemment un quignon de pain et une paillasse…mais fournissez lui du poulet rôti à point et un lit de milieu, et il en usera tout aussi bien que quiconque ». Donnons au peuple la chance de découvrir le meilleur combattant après qu’il a acclamé le talentueux « saltimbanque ».

Abdoulaye Wade, non plus, n’aimerait pas trop ça  mais il ne se privait pas d’inviter les colosses à sa table. Macky Sall ? Attendons sa période de vulnérabilité, les présidentielles, en 2019 ! Chut, c’est un tabou, depuis que l’Imam du Cap Vert….Il parait que suggérer des réformes au monde du sport « nationalisé » est aussi un tabou. Encore une petite digression.

Il est tout à l’honneur du Comité national de gestion de vouloir perpétuer cette prétentieuse « exception sénégalaise »,  mais la lutte est censée être un sport de combat. Il n’y en a aucun dans ce monde qui ne donne à l’athlète, au cours d’une opposition, la possibilité de se reprendre. C’est là tout le charme du sport en général ; Soupirer plus qu’un golfeur, se relever plus vite qu’une marmotte, se battre comme un lion pour remonter la pente devant ses inconditionnels. Balla Gaye II n’aurait pas crié sur tous les toits être meilleur que tous ses bourreaux s’il lui avait été permis de rectifier le tir les soirs de ces désillusions ou à ces adversaires de lui infliger de plus mémorables chutes au bout de trois rounds.

Le CNG n’aurait plus besoin de fixer l’âge de la retraite à quarante-cinq ans. Le combattant, de sa propre autorité et conscient que le sport a repris le dessus sur le folklore, s’épargnerait d’affligeantes déconvenues au crépuscule de sa carrière. Il faut enlever à la lutte cette dose trop aléatoire même quand le plaisantin Yawou Dial affronte le roi des arènes. Encore une autre bizarrerie. Demain, un obscur et fortuné promoteur peut décider d’organiser une confrontation entre Bombardier et un quelconque lutteur sorti de sa botte secrète. Le colosse de Suisse, Rocky Balboa, par exemple ! L’arène pourrait alors se retrouver avec un roi qui n’a livré qu’une seule opposition. On pensera alors à bien « nommer les choses ».