Les « Colombes » et autres autoproclamés
médiateurs ou entremetteurs, c’est selon, ont été bien inspirés de considérer
le président Macky Sall comme le « fils » d’Abdoulaye Wade. Il n’a pas fait que lui succéder au
pouvoir. Il le parodie. Et ce n’est là qu’un doux euphémisme pour faire honneur
à son rang. Le troisième président de la République du Sénégal profitait des
instants solennels de recueillement pour appeler la classe politique à se
réunir autour de « l’essentiel ». Ce mot n’avait évidemment pas la
même acception pour tout le monde. Toujours est-il que son appel fut rarement
suivi d’effets. Il n’y avait que ceux-là que les « prairies bleues »
attiraient déjà qui s’engouffraient dans la brèche. Cela ne servait en
définitive qu’à donner une petite dose de dignité aux adeptes de la
« mobilité politique » qui ne sauraient davantage attendre d’être
conviés autour de la ripaille, cet acte « hautement républicain ».
Son successeur s’y est inscrit, avec moins de faconde
certes, en réaffirmant son désir de nouer le dialogue avec l’opposition
récemment quand il est allé présenter ses condoléances à une responsable
politique. C’est louable venant d’un chef d’Etat taxé, à tort ou à raison,
d’homme impassible et intransigeant. Mais, là n’est pas la question. L’impression
qui se dégage quand on parle de dialogue au Sénégal, c’est qu’il est circonscrit autour des leaders
politiques. Il est davantage fait état de contentieux électoraux, de
négociations sur les retombées
éventuelles et l’avenir politique des uns et des autres. L’enjeu est moins défini en termes de propositions de
gouvernance, de gestion des affaires publiques. Et s’il ne s’agissait que de
cela, l’Assemblée nationale, comme dans tous les pays où les institutions
jouent leurs rôles, est le lieu indiqué pour évoquer tous les sujets concernant
les affaires de la cité. C'est vrai qu'on s'y farde la tronche (pour les ex-mères mbotaay) et qu'on s'y "crêpe" le veston (n'est-ce pas Oumar Sarr ) davantage que les méninges ne sont triturés, waayé nak...!
Si le président de la République est en désaccord avec le
Parti démocratique sénégalais, c’est un secret de polichinelle,
l’emprisonnement de Karim Wade et les tentatives de « désagrégation »
(ce qu’il est en train de réussir) de son ancienne formation y sont pour
beaucoup. Ici, le dialogue ne se pose plus en termes d’orientation économique
ou sociale. Il a trait aux destins individuels. Et il ne lui est pas interdit
de vouloir rassembler autour de lui les forces politiques du pays en tant que
chef de parti pour sa réélection même si cela pose le problème de la confusion
des rôles dans l’espace public. A-t-on affaire au leader de parti ou au
président de la République. Les divergences d’opinions, d’options ne sont en
rien préjudiciables au fonctionnement des institutions. Cela est plutôt un
baromètre de la vitalité démocratique.
S’il doit y avoir dialogue, c’est certainement avec les
syndicats de l’enseignement et de la santé vers qui il faut se tourner. Toute
autre entreprise n’est que jeu politique sans intérêt pour les Sénégalais qui
ont d’autres préoccupations plus urgentes que les chamailles et palabres des
animateurs des 200 partis et des poussières. Le désamour entre la classe
politique et les populations tient au fait que le débat public n’est pas en cohérence
avec les aspirations des citoyens. Les appels au dialogue ne sont que de la
poudre aux yeux. Les transhumants s’empresseront de se débarbouiller le visage
pour répondre aux jouissances de sa majesté. Et ils n’auront finalement servi
qu’à cela.