Quand je n’étais encore qu’un môme aimant s’acoquiner
avec les malfamés individus, il m’arrivait de voir des choses peu ordinaires.
Il y avait parmi eux, un jeune « gars » qui se rengorgeait de ses
étrangetés (ou déviances pour faire genre) pour nous impressionner :
manger un chat par exemple (là où nous
étions, on ne s’en nourrissait pas). Plus on semblait s’émouvoir de sa
singularité, davantage il nous en mettait plein la vue. Un jour, on me raconta que
le cocasse personnage « fricota » avec une bourrique (pour satisfaire
sa libido ?) devant un parterre de curieux. Cela fit le tour de quelques
chaumières. Certains n’y crurent point. Il parait qu’il a reçu quelques baffes
des contristées mains de sa génitrice.
Pour convaincre les sceptiques, il reprit son infamante
scène de petites mœurs. Est-il un zoophile ? Un simple maniaque
instinctif ? Un petit inconscient en mal d’attention ? Je ne l’ai
plus revu depuis cet épisode. J’étais parti sous d’autres cieux. Mais, me dit-on, c’est un homme respectable
aujourd’hui avec, comme on se plait à
concevoir l’épanouissement, une épouse et des enfants. C’est un rescapé pour
parler de manière triviale. Ne le sommes-nous pas tous d’ailleurs ? Les
irrépressibles envies ne sont pas forcément celles-là communes qu’on découvre
par soi-même. Elles sont parfois suscitées par l’autre…à la même conformation
des organes génitaux. Certains s’y attacheront. D’autres s’en détourneront. Cet
autre n’est pas toujours cet être venu d’ailleurs aux antipodes de nos
valeurs…sexuelles ! C’est un oncle, le copain de papa, l’amie de maman, la
tante…Le « mal » est ici. Il est en nous. Des marches de
désapprobation ne feront que l’enfouir au tréfonds des désirs opprimés. On ne
criminalise pas des inclinations naturelles. On les encadre pour préserver les
âmes insouciantes dans nos internats, dans nos couvents, dans nos écoles
coraniques etc.
Les mâles chiqués aux phrasés et tics exquis (parce que
répétés dans nos chaumières) qui s’entichent du membre viril devraient inciter
à nous interroger sur ce qu’on est (ou croit) en train de devenir. Sur ce que,
peut-être, nous ne sommes plus : nous-mêmes.
Quand les institutions pourvoyeuses de sens sont en
parfaite contradiction avec l’imaginaire des « masses », il ne faut
pas s’étonner que la société soit désarticulée. Les désirs « matés »
de ceux qui estiment que « rien de ce qui procure la joie n’est contre la
nature » (Henri Troyat), profitent des brèches laissées entrouvertes par
notre propre déliquescence entretenue par nos fourberies qu’on prend pour des
valeurs. La soutoura. Mon œil ! Ici, ce que le mari chuchote à son épouse
est cancané à la foire aux médisances. Les invertis, les gigolos, les
zoophiles, on les connait plus que ne semble le démontrer notre ébahissement
face à leur « subite » exubérance.