mercredi 20 janvier 2016

Neegu Yalla, bitik Imam aki gangooram


D’ex-rupins à la retraite, en mal d’« audience » (les drianké sont allées chercher ailleurs) et d’exutoire, prennent plaisir à transformer  tous les petits coins de nos  exigus quartiers en  « échoppe ». Ou si vous voulez, mosquée, neegu Yalla.  On garnit son dressing-room de froufrous, de grands boubous empesés. Le falzar et la chemise sont mis au frigo. On s’achète un chapelet plus gros qu’un boa. On marmonne en saluant les bonnes dames. On dégotte un imam à la rhétorique savoureuse. C’est une aubaine pour lui. Il n’a jamais rien fait dans sa vie. C’est lui qui séparait les ménagères qui se crêpaient le chignon quand ses nouveaux « copains » (qui se souvenaient de lui à chaque fois qu’ils devaient donner l’aumône aux indigentes gens) étaient au boulot. La bande des ex-coquets (coquins ?) à la retraite le sort de son ennuyeuse existence et le met au centre des crédules dévots. Il leur faut bien un imam « compagnon » fidèle de la galère, prêt à les accompagner dans leur subite repentance et qui ne leur ressasserait pas inlassablement les paroles divines. Ce n’est d’ailleurs pas sûr que l’Imam en sache bien davantage qu’eux. Il a juste dû apprendre à mieux débiter la Sourate Fatiha et quelques petits versets (Julli day gaaw, waruño teye mboolo mi) qu’une bouche dépeuplée de ses dents ne réciterait guère moins bien que lui.
Un  peu de tintamarre ne ferait pas de mal à un nouveau « commerce » tenu par une vieille garde décidée à le rentabiliser. Des « laay laay lal-la » criés (le participe « psalmodiés » aurait été insultant pour les êtres férus de bonnes notes) à tue-tête y participent. L’oreille du Seigneur est devenue dure ! Il faut hurler ! Les micros amplifieront « l’horreur ». La transition n’est jamais évidente. Une embardée effraie toujours. Soyons indulgents avec les nouveaux « fous de Dieu ». Passer de Peter Tosh ou Ray Charles à Abdallah Soudais…ça craint ! Ou de « chauffeur » de bal musette à muezzin insomniaque ! Ça sonnaille beaucoup, mal et fort. Et à envie. Désormais, le peuple se réveillera tôt. Les oreilles siffleront. Les « pestiférés » peu exaltés pesteront. La gérontocratie s’en moque éperdument. Elle doit bien vendre sa cabane, l’entretenir. Il y aura toujours un « machin à acheter » : une moquette, un plafonnier, un micro, « def ci jakk ji, man kaana lillahi kanal lahu lahu ». Les patriarches stimuleront l’élan de commisération des âmes bienfaitrices à l’égard de…leurs pauvres, « dimbali neew ji doole yi ».
Les vieux copains, « accotés » au discours mystificateur de leur recrue d’imam, s’entichent jalousement de cabas et de besaces. Leur « forteresse » devient le réceptacle de nos compassions, de nos désirs viscéraux de croire au mirage, à leur soudaine « métamorphose spirituelle », Yalla mooy defar jaam bi, mookoy sedd ». Les menues monnaies récoltées ça et là ne sont qu’une gratification du Seigneur satisfait de la bonne tenue de sa « chambre », jamais aussi bien animée.

A pour - suivre…