vendredi 15 mai 2015

Le campus, une poudrière


Etudiant blessé suite aux affrontements avec les forces de l'ordre
Le protocole de Saly de novembre 2011 signé entre le gouvernement et  le syndicat autonome de l’enseignement supérieur préconisait la création d’une police universitaire pour la sécurisation d’un espace particulièrement marqué par des actes de violence. Elle n'existe toujours pas. A la place, nous avons quelques individus musculeux qui suscitent chez les étudiants un sentiment de défiance.

 Harouna Sy, dans une étude (Crises scolaires et universitaires au Sénégal. La mécanique revendicative et ses cadres organisationnels),  mentionne trois types de violence scolaire : la violence militante, la violence délinquante et l’indiscipline. On ne peut pas dire que l’université Cheikh Anta Diop en soit épargnée. C’est celle là militante qui est la plus présente dans le campus. Elle est motivée par la défense d’intérêts spécifiques, essentiellement des étudiants : hausse des frais d’inscription, retard de paiement des bourses, bacheliers non orientés…Il faut ici pointer la mauvaise communication des pouvoirs publics. Dire que tous les étudiants sont boursiers alors qu’il n’en est rien peut créer un sentiment d’injustice, de frustration, vecteur de violence. Pour certains, la bourse a une valeur éminemment sociale. Un espoir déçu est porteur de germes de violence.
 La violence peut prendre une forme délinquante si ces revendications sont portées par des groupes politiques particulièrement présents dans le campus universitaire ou par des individus qui n’ont pas ou plus rien à y faire. L’université Cheikh Anta Diop est devenue un fourre-tout où règnent des étudiants regroupés au sein des amicales de facultés souvent utilisées à des fins politiques et pécuniaires. La dissolution des amicales était la conséquence de la violence notée lors des élections. De l’indiscipline des étudiants et de leurs hommes de main désœuvrés comme il en existe beaucoup dans la société sénégalaise. Justement, c’est sur celle-ci qu’il faut porter la réflexion. Les étudiants ne vivent pas en vase clos et viennent tous de quelque part.
Un fait reste constant ; il y a trop d’étudiants à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Leurs difficiles conditions de vie et d’étude ne favorisent pas un climat serein. Les quotidiennes frustrations accumulées peuvent expliquer les fréquentes séquestrations d’autorités administratives, les détournements de bus, les échauffourées avec les agents de sécurité du campus…

Un étudiant, par une boutade presque caricaturale, disait que le temple du savoir est devenu un centre de formation de jet de pierres et de techniques de défense aux grenades lacrymogènes. Cette moquerie ne déplairait pas aux usagers de l’avenue Cheikh Anta Diop et aux forces de l’ordre.